«Je ne veux pas d’un médecin qui me soigne chronomètre en main.»
«Je refuse qu’on m’oblige à rationner le temps que je dois à mes patients.»
«Pourquoi ne pouvez-vous pas me revoir avant six semaines, docteur?»
«Parceque le système malsain du budget global ne me laisse pas d’autre choix.»
«Je ne tolérerai pas que mon médecin me considère comme un facteur de coût.»
«Je refuse de traiter mes patients comme des facteurs de coût.»
«Il est scandaleux de voir la bureaucratie voler au médecin du temps qui devrait revenir aux patients.»
«Je trouve aberrant que la bureaucratie me laisse de moins en moins de temps pour mes patients.»
«Mon médecin me soignera-t-il jusque’à ce que je guérisse ou jusqu’à épuisement des fonds?»
«Mes patients méritent que leur santé dépende de la médecine et non d’un budget global.»
«Pour quelle raison êtes-vous contre le projet du budget global?»
«Parce-qu’il ne m’autorisera pas à vous soigner comme je le devrais.»
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Médecins et patients – ensemble, les uns pour les autres.

Les acteurs politiques et économiques proposent à intervalles toujours plus rapprochés des mesures visant à lutter contre la hausse des frais de santé. Nous, médecins, avons conscience que ces dépenses croissantes pèsent autant sur les ménages que sur le budget cantonal. Néanmoins, nous ne tolérerons aucune restriction budgétaire qui se fera au détriment des patients et de la qualité des traitements! Il faut refuser les mesures visant à rationner les prestations et à plafonner les dépenses. Cela entraînerait une médecine à deux vitesses qui accablerait encore davantage les foyers les plus modestes.

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Le budget global est connu sous plusieurs noms

Objectifs globaux, frein aux coûts, plafonds, budgets de volume, gestion des coûts – peu importe le terme utilisé, le but reste le même: un budget global pour le système de santé suisse. Qu’est-ce que cela signifie pour les patientes et les patients? Le monde politique souhaite à l’avenir restreindre l’étendue des prestations médicales. Le droit à l’assurance du patient prend ainsi fin avec le budget.

L’exemple de l’Allemagne montre quel scénario nous menace. Notre voisin du Nord applique un budget global à son système de santé depuis deux décennies. Si un médecin a atteint son «plafond», il ne peut plus prendre de patients en charge. Certains médecins ferment même leur cabinet pendant des jours entiers afin de ne pas dépasser le budget. Leurs patients doivent par conséquent changer de médecin ou bien attendre. Les reports de rendez-vous au trimestre suivant sont depuis longtemps pratique courante.

Autre conséquence encore plus dévastatrice: les patients qui nécessitent un traitement complexe ou qui sont atteints d’une maladie chronique explosent rapidement le plafond prévu. Ils deviennent ainsi un fardeau pour n’importe quel cabinet. Les médecins sont ensuite contraints de refuser les patients «coûteux». Ou encore, selon les mots de Volker Ulrich, économiste allemand de la santé: «Dans un budget global, [le médecin qui] agit de manière économique [est] celui qui parvient à rester à l’écart des soins aux malades.»

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L’autonomie sur le banc d’essai

Les expériences avec les budgets globaux montrent que les décisions thérapeutiques des médecins sont perpétuellement remises en question, ce qui nuit à la liberté de traitement. Ce n’est plus le médecin et son patient qui décident, mais l’assureur.

Les conséquences d’un système de santé piloté par l’Etat sont visibles en Grande-Bretagne: des institutions surpeuplées, un personnel frustré, des patients en proie au désespoir. Le système de santé britannique (NHS) est en piteux état. Tandis qu’en Suisse, les frais de santé sont pris en charge par l’assurance de base, la participation financière des ménages et l’Etat, le budget de la NHS repose sur les taxes. Comme il fait partie intégrante des finances publiques, la dotation du NHS dépend des acteurs politiques. Et ceux-ci ont, ces dernières années, imposé au NHS des mesures d’austérité ainsi que des réformes afin de stimuler la compétitivité. On espérait qu’une plus grande liberté de choix et une compétition accrue amélioreraient la qualité des soins et réduiraient les délais d’attente. Tout ceci ne s’est jamais réalisé. Les dernières nouvelles montrent que les malades chroniques, les personnes âgées, les pauvres et les plus démunis attendent aujourd’hui plusieurs mois avant d’obtenir un rendez-vous. On a réduit les dépenses allouées à leur prise en charge médicale et leurs aides sociales, fermé des services de soin, des maisons de retraite et des centres sociaux.

Les expériences en Grande-Bretagne montrent que la planification globale des budgets, les plafonnements et les objectifs contraignants ne se basent pas sur les besoins médicaux. Ils nuisent non seulement à la relation de confiance entre le médecin et les patients, mais peuvent aussi avoir des conséquences désastreuses pour tout le monde.

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Plus de diktat, moins de qualité

A l’avenir, l’Etat souhaite prévoir le montant des frais de santé un an à l’avance. Ce sera donc aux acteurs politiques et à l’administration d’estimer le besoin en soins et non plus aux médecins et à leurs patients. Cependant, le plafonnement des frais aura des répercussions sur les patients qui ne pourront plus partir du principe que les prestations obligatoires seront remboursées. Si le patient ne veut ou ne peut pas renoncer à l’acte médical, il faut soit qu’il le prenne lui-même en charge, soit que le médecin le propose à titre gracieux. L’expérience allemande a montré que certains patients doivent attendre plusieurs semaines avant d’obtenir un rendez-vous, leur médecin ayant déjà épuisé le budget réservé à la prise en charge des prestations.

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Médecine à deux vitesses

En Allemagne, jusqu’à 20% des prestations réalisées par les cabinets ne sont pas payées. Le pilotage des coûts relatifs aux soins ambulatoires donne lieu à une médecine à deux vitesses. Les délais d’attente avant l’obtention d’un rendez-vous augmentent pour les patients qui n’ont qu’une assurance de base. Seules les personnes assurées dans le privé ou qui payent de leur poche peuvent jouir d’un accès privilégié.

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Les formalités empêchent de bien se soigner

Il n’est pas rare que les caisses-maladies soupçonnent à tort certains médecins de travailler de manière «peu rentable». Ceci donne par la suite lieu à une procédure d’économicité aux conséquences désastreuses pour les médecins incriminés. Ces derniers doivent alors faire face à des recouvrements à hauteur de plusieurs millions réclamés par les assureurs. Ce sont notamment les médecins ayant la charge de nombreux malades chroniques que l’on considère comme «statistiquement suspects». Ce qui est cohérent étant donné que leur prise en charge entraîne automatiquement des frais élevés pour un cabinet. Alors que leur comptabilité est tout à fait correcte, ces médecins sont accusés par les assureurs d’avoir recours à des méthodes de travail peu rentables. Conséquences: une énorme charge bureaucratique visant à justifier la rentabilité, la pertinence et l’efficacité des traitements.

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Les chiffres

68%

des femmes vivent encore cinq ans après avoir été diagnostiquées d’un cancer. Il y a 20 ans, la moyenne était de 62%.

65%

des hommes vivent encore cinq ans après avoir été diagnostiqués d’un cancer. Il y a 20 ans, la moyenne était de 56%.

27%

De 1983 à 2012, la mortalité des cancers chez la femme a diminué de 27%.

36%

De 1983 à 2012, la mortalité des cancers chez l’homme a diminué de 36%.

Le progrès grâce aux investissements

Beaucoup de personnes connaissent moins l’intérêt du système de santé que les dépenses qu’il engendre. Nous ne devrions cependant pas évoquer son coût élevé sans tenir compte de ses innombrables avantages. Depuis l’introduction de l’assurance obligatoire des soins en 1996, le nombre d’années de vie potentiellement perdues a diminué de 40%. Nous devons notamment cet allongement de l’espérance vie au progrès médical. Le faible taux de mortalité des cancers en est une preuve manifeste: les chances de guérison, particulièrement chez l’enfant, ont augmenté de manière significative. Le taux de survie à cinq ans s’élève désormais à 85%. La Suisse fait ainsi partie des pays où les traitements des cancers pédiatriques affichent les meilleurs résultats.

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Une vie plus longue

Les avantages d’un système de santé de haute qualité: allongement de l’espérance de vie, amélioration de la qualité de vie, participation accrue à la société, prévention ou réduction des arrêts de travail. Son utilité profite à l’ensemble de la population.

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72%

C’est l’augmentation totale des frais de santé depuis 1996, tandis que dans un même temps, la prime moyenne des assurances-maladie a connu une hausse de 107%.

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40%

Le nombre d’années de vie potentiellement perdues a diminué de 40% depuis l’introduction de l’assurance obligatoire des soins en 1996.

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83 ans

C’est l’espérance de vie à la naissance en Suisse. Nous nous trouvons au deuxième rang mondial, juste derrière le Japon. Ceci montre que nous sommes en meilleure santé que la plupart des autres pays industrialisés.

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4,7 ans

C’est le nombre d’années de vie que les hommes suisses ont gagné entre 1996 et 2015.

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2,9 ans

C’est le nombre d’années de vie que les femmes suisses ont gagné entre 1996 et 2015.

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Vers la campagne

Ensemble pour un système de santé raisonnable

Le Parlement prévoit des projets de loi qui mettent en danger la prise en charge des patientes et des patients. De nombreuses sociétés cantonales de médecine et leurs associations faîtières s’y opposent par une campagne politique. L’objectif : les médecins et leurs patients sont des alliés. Ensemble, ils expriment ce qu’ils attendent du système de santé. Actuellement, des annonces sont publiées dans les journaux et certains journaux du dimanche.